latin - troisième - première séquence - texte n° 4

 

Texte d'étude : Suétone, Néron, Vies des Douze Césars, 2, 3

 

La mort de Britannicus

 

Britannicum non minus aemulatione vocis, quae illi jucundior suppetebat, quam metu ne quandoque apud hominum gratiam paterna memoria praevaleret, veneno adgressus est. Quod acceptum a quadam Lucusta, venenariorum indice, cum opinione tardius cederet ventre modo Britannici modo, accersitam mulierem sua manu verberavit arguens pro veneno remedium dedisse, excusantique minus datum ad occultandam facinoris invidiam:

Coegitque se coram in cubiculo quam posset velocissimum ac praesentaneum coquere. Deinde in haedo expertus, postquam is quinque horas protraxit, iterum ac saepius recoctum procello objecit; quo statim exanimato inferri in triclinium darique cenanti secum Britannico imperavit. Et cum ille ad primum gustum concidisset, comitiali morbo ex consuetudine correptum apud convivas ementitus postero die raptim inter maximos imbres tralaticio extulit funere. Lucustae pro navata opera impunitatem praediaque ampla, sed et discipulos dedit.

 

Vocabulaire des mots soulignés

accipio, is, ere, accepi, acceptum : recevoir

accerso, is, ere, -sivi, -situm : faire venir, envoyer chercher

arguo, is, ere, argui, argutum : démontrer

excuso, as, are, avi, atum : se justifier

recoquo, is, ere, recoxi, recoctum : faire recuire

ceno, as, are, avi, atum : dîner

corripio, is, ere, corripui, correptum : saisir vivement

 

 

Traduction

Il décida de se débarrasser de Britannicus par le poison, non seulement parce qu'il était jaloux de sa voix, mais aussi par peur qu'un jour il ne le dépasse dans l'estime des gens en souvenir de son père. Alors qu'il avait reçu d'une certaine Locuste, une référence en matière de poisons, un breuvage qu'il jugeait trop lent et qui ne donna que des maux de ventre à Britannicus, il convoqua cette femme et la frappa de sa propre main; il lui reprochait de lui avoir donné un remède plutôt qu'un poison et elle se justifiait en disant que c'était pour occulter le crime. "

Il la força à préparer, dans sa chambre, sous ses yeux, un poison aussi rapide et efficace que possible. Ensuite, il l'essaya sur un cabri et celui-ci périt après cinq heures. Aussitôt, l'ayant fait recuire, il le donna à un marcassin qui mourut sur le champ. Il ordonna alors de porter le poison dans le triclinium et de le donner à Britannicus qui devait manger avec lui. Alors que le prince était tombé aussitôt qu'il l'avait goûté, Néron dit aux convives que c'était une crise d'épilepsie comme il en avait souvent et le lendemain, il lui donna, à la hâte, des funérailles ordinaires, sous une pluie battante. Néron donna à Locuste, pour prix de ses services zélés, l'impunité, de grandes propriétés mais aussi des disciples.

 

Questions

1- A l'aide du vocabulaire, revoir la formation des participes présents et passés.

2- Rappeler la formation et les emplois de l'ablatif absolu.

3- Qui était Britannicus et pourquoi Néron le fit-il assassiner ?

 

 

Textes complémentaires :

 

Tacite, dans le livre XIII de ses Annales, raconte lui aussi la mort de Britannicus…

 

L'usage était que les enfants des princes prennent leurs repas avec d'autres nobles du même âge, sous les yeux de leurs parents, à une table particulière et moins abondante. C'est là que dînait Britannicus; parce qu'un de ses suivants était chargé de goûter ses plats et ses boissons, et pour que le crime ne soit rendu évident par la mort de l'un et de l'autre, voici la ruse que l'on mit au point : une boisson encore saine mais très chaude, approuvée par le goûteur, est apportée à Britannicus; comme il la repoussait en raison de sa chaleur, on y verse de l'eau froide qui contenait le poison de sorte que celui-ci envahit tous ses membres au point que sa voix et son souffle lui furent ôtés en même temps. On tremble parmi les convives, les imprudents s'enfuient; mais ceux qui avaient plus de jugement restent à leur place et fixent Néron du regard. Celui-ci, alors qu'il était allongé et feignait la surprise, dit que c'est une crise d'épilepsie habituelle, mal dont Britannicus est affligé depuis son enfance, et qu'il va peu à peu recouvrer ses sens et sa vue.

Cette même nuit réunit et la mort et les funérailles de Britannicus dont les préparatifs avaient été réalisés et qui eurent lieu de façon modeste, bien que ce fût tout de même au Champ de Mars. Il plut tellement que le peuple pensa que c'était un signe de la colère des dieux contre le crime, que la plupart des hommes ignoraient encore tout en sachant que la discorde entre les frères était ancienne et que le trône ne pouvait être partagé.

 

 

Le règne de Néron fut marqué par un autre événement : l'incendie de Rome…

Le voici présenté par nos deux auteurs : Suétone et Tacite

 

Il n'épargna pas même le peuple de Rome ni les murs de sa patrie. Un de ses familiers ayant cité, dans la conversation, ce vers grec : "Que tout s'embrase et périsse après moi", "Non, répondit-il, que ce soit de mon vivant"; et il accomplit sa menace. Choqué, à ce qu'il disait, du mauvais goût des anciens édifices, du peu de largeur et de l'irrégularité des rues, il fit mettre le feu à la ville, et si ouvertement que plusieurs consulaires, surprenant dans leurs propriétés des esclaves de sa chambre, avec des flambeaux, n'osèrent pas les arrêter. Des greniers voisins du Palais d'Or, et dont le terrain lui faisait envie, furent incendiés et battus par des machines de guerre parce qu'ils étaient construits en pierre de taille. Ces ravages durèrent six jours et sept nuits, et le peuple n'eut d'autre refuge que les monuments et les sépultures. Néron contempla cet incendie du haut de la tour de Mécène, "charmé, disait-il, de la beauté des flammes", et il chanta, en costume de théâtre, "la prise de Troie". Il reçut et même exigea des contributions pour les réparations de Rome, et il faillit ruiner ainsi les particuliers et les provinces.

 

Suétone, Néron, XXXVIII

 

 

Un désastre survint ensuite, soit qu'il fût accidentel ou traîtreusement organisé par l'empereur - des auteurs donnent les deux versions - pire et plus horrible que tous les désastres précédents par la violence des flammes. Le feu débuta dans la partie du Cirque qui jouxte le Palatin et le Caelius, au milieu de magasins contenant des produits inflammables. A cet endroit, les maisons n'étaient pas protégées par de la maçonnerie, les temples n'étaient pas entourés de murs, aucun obstacle n'enraya la progression du feu.

 

Néron, à ce moment-là, était à Antium et ne revint à Rome que lorsque le feu s'approcha de sa maison qu'il avait construite pour relier son palais avec les jardins de Mécène. On ne put empêcher, cependant, le feu de dévorer le palais, la maison et tout ce qui se trouvait alentour. Malgré cela, pour soulager le peuple, qui se trouvait sans abri, il ouvrit le Champ de Mars et même ses propres jardins. On apporta des vivres d'Ostie et des villes environnantes et le prix de la mesure de blé fut abaissé à 3 sesterces. Ces actes, bien que populaires, ne produisirent aucun effet car la rumeur avait circulé partout que, au moment précis où le feu s'emparait de la ville, l'empereur était apparu sur une scène et avait chanté la destruction de Troie, comparant le malheur présent au désastre antique.

 

Tacite, Annales, XV, 38-39

 

Document complémentaire : article de Jean-Michel Croisille, Néron a t-il brûlé Rome ?, paru dans l'Histoire n° 234, juillet-août 1999.

 

 

Questions

1- Comparez les deux récits de la mort de Britannicus; quels sont leurs points communs, leurs différences ?

2- Faites le même travail sur les deux récits de l'incendie de Rome. Quelles conclusions en tirez-vous sur les deux historiens Suétone et Tacite ?

 

 

 

Vocabulaire à retenir

ab + Ab. : loin de, à partir de, par

autem :or

bene : bien

contra + Ac : en face, au contraire, contre

cum + Ab : avec

cum + ind. : quand

cum + subj. : comme, alors que

de + Ab. : au sujet de

deinde : ensuite

ex + Ab. : hors de

pro + Ab. : à la place de

sed : mais

 

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